Non à la criminalisation des mouvements sociaux
Solidarité avec Ahmed Meguini
par Annie Griffon
 

Fin juillet, à Strasbourg, un campement pour la libre circulation des personnes était organisé par le collectif " No Border ". Au cours de l’évacuation musclée des manifestants par les forces de l’ordre, un certain nombre de personnes ont été arrêtées, dont Ahmed Meguini, accusé d’avoir blessé un policier à la main. Bien que contestant les faits, Ahmed a été condamné à huit mois de prison ferme, il est incarcéré et maintenu au secret, avec interdiction de visite. Un militant luttant pour la reconnaissance des plus précaires des précaires subit ainsi le traitement habituellement réservé aux plus dangereux des criminels.

Un comité de soutien s’est constitué, et comme la décision du maintien au secret d’Ahmed dépend du Ministère de la Justice, dix sept militants ont occupé symboliquement et pacifiquement une annexe strasbourgeoise de ce Ministère, le 23 août vers 16 H, déployant à une fenêtre une banderole : " Collectif pour la libération d’Ahmed ". Trois employés, qui n’ont subi aucune violence, ont choisi de rester à l’intérieur des bureaux afin de surveiller le matériel, à la demande de leur hiérarchie. Les occupants ont été évacués et arrêtés à 19 heures, ainsi que trois des manifestants qui se trouvaient dans la rue, lors de l’intervention policière.

" Les mains entravées dans le dos, ils ont été emmenés à bord des fourgons de police " a constaté une journaliste de l’AFP sur place. " Le GIPN – Groupement d’intervention de la police nationale- a ouvert la porte de force pour pouvoir pénétrer dans les locaux et libérer les personnes séquestrées " a déclaré le vice-procureur de la République aux journalistes présents, soulignant que la " séquestration " est un délit très grave.

Les dix-sept jeunes sont poursuivis pour " séquestration ", alors que les employés, libres de quitter les lieux, sont restés dans les locaux à la demande de leurs supérieurs, et ont déclaré, souriants, par la fenêtre, aux journalistes : " on reste pour le matériel ". Le Tribunal correctionnel s’étant déclaré incompétent, ils sont à présent passibles de la Cour d’Assises !!!

Ce fait divers est un exemple d’une répression policière injuste et démesurée vis-à-vis d’activistes non violents. Le mot liberté mérite-t-il encore de figurer au fronton de nos Préfectures, alors que des syndicalistes sont emprisonnés et que des militants pour les Droits de l’Homme, agissant pacifiquement, sont passibles d’être condamnés pour prise d’otages ? Ces entraves à l’action syndicale et associative et ces atteintes à la liberté d’expression sont gravissimes.

Cet été, un amendement au projet de loi d’orientation et de programmation sur la Justice de Dominique Perben, a heureusement été rejeté, mais, le fait même qu’il ait été proposé, en dit long sur la conception de la liberté d’expression de certains de nos députés, dont aucun, pourtant, ne se déclare appartenir à la Droit extrême : il s’agissait d’instaurer une amende de 80 000 euros et une peine de 2 ans d’emprisonnement pour offense au Président de la République.

Nous sommes entrés dans des années de plomb, où le tout sécuritaire accompagne les injustices sociales, et où les luttes non-violentes sont criminalisées, afin d’être mieux étouffées.

Résistons à la répression policière et aux entraves à la liberté, en commençant par exprimer notre solidarité aux Sans-papiers, aux militants de " No Border " et à Ahmed Meguini.

 
Annie Griffon