Accueil | Bulletins | Agenda | Contacts

 

Guerres et soumissions

 

La guerre en Irak a eu lieu, malgré une mobilisation massive en Europe et dans le monde, et a abouti sans surprise à la victoire des anglo-américains : ils occupent militairement le pays et entendent contrôler " démocratiquement " le futur gouvernement. L’administration Bush, depuis le 11 septembre, veut remodeler le monde. Cette fois, il ne s’agit plus de perpétuer des coups d’Etat, par l’intermédiaire de la CIA, et d’amener au pouvoir des dictateurs qu’elle a formés (comme en Amérique centrale et en Amérique du Sud), mais d’installer directement dans les pays musulmans des régimes à ses ordres. Le gouvernement Bush a finalisé son plan démoniaque, téléguidé par les lobbies pétroliers et un capitalisme aux abois " qui veut à tout prix améliorer les taux de profit. C’est un véritable cahier des charges, qui vise à doper la rentabilité des processus de production capitalistes, soit directement par la conquête des ressources et des marchés que permet la guerre, soit indirectement par le levier économique des industries et recherches d’armement d’abord, mais aussi, par le dévoiement des enjeux politiques, économiques, sociaux et même culturels, que représente cette guerre … Ce cahier des charges est celui d’un capitalisme à l’offensive partout … :

Sortir de la spirale de la récession en dopant le complexe militaro-industriel et en faisant main basse sur les ressources et sur les couloirs énergétiques (l’Irak, après le Kosovo et l’Afghanistan) … L’objectif étant que cette guerre rapporte plus qu’elle n’aura coûté ;

Satisfaire la frénésie de nouveaux débouchés, en ouvrant de nouveaux marchés par les conquêtes militaires et en interdisant aux pays dits émergeants d’émerger et de s’affranchir des institutions néo-coloniales tels le FMI et la Banque mondiale ;

Trouver de nouvelles marchandises à " fourguer ". L’éducation, la culture, la santé ayant de ce point de vue l’avantage d’être des marchés captifs et inépuisables, dont l’essentiel de l’investissement est assuré par les Etats, sont dans le collimateur de l’OMC. La guerre permet d’occulter le débat sur les secteurs que ces pays désirent soumettre aux lois du marché, dans le cadre de l’AGCS, avant le 30 mars 2003 ;

Baisser les coûts de production : austérité des salaires et remise en cause de la protection sociale et des retraites avec un renforcement des leviers que sont le développement du chômage, de la précarité et de la pauvreté, dans le monde comme dans notre pays ;

Se doter des armes idéologiques permettant de gagner les opinions, les médias … en développant les obsessions sécuritaires et le contrôle social et en se débarrassant de la résistance à la mondialisation libérale " (1)

Il est à souligner que le cautionnement religieux à cette guerre est fondamental pour sa justification. Le choix de Bush est de la présenter implicitement comme " une croisade du judéo-christianisme occidental contre les infidèles … ". " C’est au nom de Dieu que Bush et Blair sont partis en guerre. C’est au nom de Dieu que Bush et l’extrême Droite américaine soutiennent Sharon " (2) contre le peuple palestinien. Comme le dit Michel Warschwaski " en s’inscrivant dans le projet de croisade de l’Occident contre le monde islamique, Israël est en train de faire le choix d’un combat culturel domestique qui peut, à court terme, consacrer l’hégémonie d’un intégrisme religieux et guerrier, prêt à lancer le jihad messianique, au nom du Dieu juif et … de la civilisation chrétienne. Car, telle est bien l’essence de l’alliance perverse entre les courants messianico-nationalistes juifs et l’intégrisme protestant qui entoure G.W. Bush " (3)

Dans les populations musulmanes, cette guerre ne peut que provoquer la colère, eu égard au conflit israélo-palestinien où, jour après jour (dans un silence médiatique), les exactions sanglantes contre la population palestinienne se poursuivent avec le soutien logistique américain à la politique de colonisation de Sharon. Là, par contre, il n’est pas question de remettre en cause la politique meurtrière d’un général illuminé, qui est en train de conduire deux peuples à une destinée funeste.

Pour rester tout de même optimistes, les Amis du Monde Diplomatique doivent, dans le mouvement " altermondialiste ", donner à réfléchir sur la création d’autres modes de vie et de relations dans la société, excluant les rapports de domination-soumission qu’a imposés le modèle capitaliste à travers l’histoire. Le dialogue et la réflexion sont notre mode de ré-appropriation du monde et de la pensée : il nous faut réfléchir et nous organiser pour combattre l’apathie ambiante ou la soumission aux croyances communes savamment distillées par un pouvoir dominant. Dans un monde où l’individu est laissé à lui-même, il nous faut trouver la raison et la force de construire un projet d’émancipation sociale : un des thèmes phares traité dans ce bulletin est le droit au revenu minimum pour tous, lié à la recherche d’un monde plus égalitaire et fraternel qui serait, non pas basé sur le travail et l’enrichissement, mais sur l’activité et l’accès à la connaissance, dans un vaste mouvement populaire et émancipateur.

 

Fabien Desgranges

Notes :

    (1) Olivier Vinay dans Ecole émancipée – mars 2003

    (2) Pierre Stambul dans Ecole émancipée – mars 2003

    (3) "  A tombeau ouvert " Michel Warschawski – éd. la fabrique


    Accueil | Bulletins | Agenda | Contacts